Les conservateurs et les sociaux-démocrates allemands entendent notamment «renforcer» et «réformer» la zone euro avec la France pour la rendre plus résistante aux crises.
Les négociations avec le SPD ont duré plus longtemps qu'avec Vladimir Poutine. Pour arracher l'accord de Minsk dans la crise ukrainienne, la chancelière, accompagnée du président français François Hollande, avait bataillé 17 heures d'affilée en 2015. Pour obtenir des sociaux-démocrates qu'ils intègrent une nouvelle grande coalition avec elle, il lui aura fallu 24 heures. Vendredi matin, vers 8h30, les négociateurs de chaque camp se sont entendus pour engager la rédaction d'un contrat de coalition. Ils s'étaient retrouvés la veille au siège du SPD pour faire tomber les derniers «obstacles» de principe. Si la base du parti social-démocrate le confirme, l'Allemagne aura bientôt un nouveau gouvernement.
Pour Angela Merkel, c'est un soulagement. Après sa faible victoire en septembre, avec seulement 32% des voix, la chancelière s'était révélée incapable de former une coalition «Jamaïque» avec les libéraux du FDP et les Verts. L'échec de ces premières discussions l'avait contrainte à se tourner vers le SPD, sévèrement battu lors des élections législatives, avec 20,5%, et résolu à une cure d'opposition. La gauche était donc entrée avec réticence dans des discussions de coalition, faute d'autre option clairement meilleure: l'hypothèse d'un gouvernement minoritaire d'Angela Merkel n'a pas convaincu et la convocation de nouvelles élections n'aurait pas permis, à en croire les enquêtes d'intention de vote, de rebattre les cartes.
L'Europe au cœur de l'accord
Les délégués du SPD se sont toutefois réservé le droit de refuser l'accord négocié par leur président Martin Schulz: un congrès extraordinaire le 21 janvier devra valider le principe de la coalition. Et les militants seront consultés par référendum sur le contrat final qui aura été élaboré. Angela Merkel n'est donc pas encore totalement sortie d'affaire.
Les discussions ont buté sur plusieurs points sensibles. La question migratoire d'abord: les conservateurs bavarois de la CSU, alliés de la CDU, ont exigé une ligne dure sur l'asile. L'accord prévoit donc que le nombre de réfugiés ne devra pas excéder 220.000 par an et que le regroupement familial sera limité à 1000 personnes par mois. De leur côté, les sociaux-démocrates ont notamment posé sur la table une réforme de l'assurance maladie rejetée a priori par les chrétiens-démocrates. Ils se sont mis d'accord sur une réforme du financement. Dans les dernières heures de discussions, il a aussi été question d'argent: les excédents budgétaires et des marges de manœuvre de l'ordre de 40 milliards d'euros ne semblaient pas suffire pour satisfaire les exigences de chacun.
Enfin, l'Europe a joué un rôle. «Si nous acceptions de rentrer au gouvernement, ce ne serait qu'à la condition de renforcer l'Europe», avait déclaré Martin Schulz au début des discussions. L'accord prévoit donc de «renforcer la zone euro», y compris financièrement. «Nous soutenons des moyens budgétaires spécifiques pour la stabilisation économique et la convergence sociale, et pour le soutien aux réformes structurelles dans la zone euro», lit-on dans le texte.
Comme sur les autres points, il reste encore à écrire les détails.
http://www.lefigaro.fr/international/2018/01/12/01003-20180112ARTFIG00089-allemagne-merkel-arrache-l-accord-du-spd-pour-former-un-gouvernement.php